On pensait souvent que vieillir en bonne santé, c’est une question de « bons gènes ». C’est le destin, et on n’y peut pas grand chose.
Heureusement, cette pensée a fait son temps et nous avons maintenant remarqué que la qualité de vie a une forte influence sur la santé.
Mais pourrait-on mesurer cela ?
D’une façon fiable ?
Les télomères ?
Dans leur livre, Elissa Epel (psychologue santé) et Elizabeth Blackburn (biologiste moléculaire) nous expliquent comment nos cellules nous indiquent à quelle vitesse nous devrions vieillir, et même tomber malade !
Télomères : le vieillissement programmé
Pour faire simple, les télomères sont les chaussettes de l’ADN. Ce que l’on a remarqué, c’est que plus ces chaussettes étaient courtes, et plus on vieillissait rapidement. Et logiquement, plus notre age est avancé, et plus nos télomères sont courts.
Quand les télomères sont longs, et les cellules se multiplient aisément. Au contraire, les cellules âgées ont des télomères courts et cessent leurs divisions.
En 1978, alors qu’Elizabeth Blackburn étudiait une algue microscopique (Tetrahymena), elle s’aperçu que, sous certaines conditions, les télomères étaient capables de s’agrandir ! Ce fut un véritable choc car il était alors admis que la taille de ces derniers devait diminuer au fil du temps, et ne pouvait augmenter.
Puis, ce comportement fut observé également avec des levures.
De fil en aiguille, c’est en 1984, avec son assistante, qu’elle découvrit que la taille des télomères était le fait d’un enzyme, alors baptisé télomérase. Le télomérase construit et agrandit les télomères. Il permet de restorer l’ADN qui a été perdu durant une division cellulaire. Son abondance est directement liée à la longueur des télomères.
Mais n’allez pas en conclure que des télomérases artificiels pourraient alors garantir une vie éternelle. C’est tentant, mais qu’arrive-t-il s’il y a trop de télomérases dans une cellule malade ou cancéreuse ? Elle va se multiplier à l’infini… A vouloir jouer à l’apprenti sorcier, on risque l’effet inverse !
Télomères et santé
Avoir un bon réservoir de cellules souches capables de se renouveler est la clé d’une bonne santé et permet de guérir de maladies et blessures.
Lorsque les télomères d’une cellule sont trop courts, ils imposent d’arrêter les divisions ou réplications. La cellule devient alors vieille et sénescente (sénescence = Vieillissement naturel des tissus et de l’organisme.). Elle prend sa retraite et n’assure alors plus ses fonctions.
La sénescence des cellules contrôle véritablement notre vieillissement et notre santé ! Pour preuve, ils ont réussi à modifier des souris pour qu’elles aient de nombreuses cellules sénescentes. Quand ils ont pu, par je ne sais quel moyen, retirer ces cellules retraitées, les souris ont alors montré des progrès remarquables : nettoyage de la cataracte, restoration de la mobilité, et bien entendu durée de vie prolongée !
Par exemple, les cheveux blancs arrivent lorsque les cellules responsables de la pigmentation ne se reproduisent plus assez… à cause de télomères trop courts !
Ainsi, les gens qui font plus vieux que leur age ont des télomères plus courts que la moyenne.
Les télomères diminuent avec l’age. Mais leur taille peut-elle aussi déterminer si nous allons bientôt devenir malade ?
D’après la science, oui.
Des télomères courts engendrent un système immunitaire plus faible. On attrape alors les rhumes plus rapidement, et avec des symptômes plus sévères. Et cette fragilité vaut pour toutes les maladies !
Les cellules qui ont de l’ADN avec des télomères courts sont comme des pommes pourries au milieu de pommes saines : elles contaminent leur entourage ! Une cellule sénescente va appeler de l’aide comme le ferait une cellule endommagée. Sauf que la cellule sénescente est tellement paniquée par ses problèmes d’ADN qu’elle en refuse l’aide apportée. Un tel comportement bouleverse l’équilibre et peut avoir, à terme, de graves conséquences. Et le terrain devient peu à peu propice au développement des cancers.
Les cellules du sang avec de courts télomères provoquent une inflammation chronique et donnent potentiellement naissances à des problèmes cardio-vasculaires.
Les personnes avec de l’asthme, des maladies pulmonaires obstructives chroniques ou des fibroses pulmonaires ont des télomères plus courts dans leurs cellules immunitaires et dans les cellules de leur poumons, comparativement à des personnes en bonne santé.
Les télomères courts permettent, malheureusement, de prédire le déclin cognitif, et notamment augmentent les risques de maladie d’Alzheimer.
Stress et espérance de vie
En étudiant un groupe de mères s’occupant d’enfants atteints de maladies chroniques, on s’aperçoit que celles qui sont les plus stressées (stress perçu et stress mesuré scientifiquement) ont les télomères les plus courts.
Notre vulnérabilité face au stress nous fait donc vieillir prématurément.
En particulier :
- les stress chroniques
- s’occuper d’un enfant malade
- burnout au travail
- tensions familiales
- les traumatismes sérieux récents ou qui datent de l’enfance
- viols
- abus
- violence domestique
- bizutage
Certains d’entre nous réagissent à une situation difficile en se sentant fortement menacés. C’est la conséquence de télomères courts.
In vivo, l’exposition de cellules immunitaires au cortisol (hormone du stress) a atténué leur niveau de télomérase.
Mais ! Être soumis à un stress permanent ne signifie pas obligatoirement avoir des télomères courts ! Les études menées sur les mères d’enfants atteints de pathologies chroniques ont montré que certaines supportaient d’énormes fardeaux sans pour autant que leurs télomères soient raccourcis ! Cela provient de leur excellente résistance au stress.
C’est donc une bonne nouvelle : des adaptations de style de vie permettent d’allonger les télomères. Tout n’est donc pas perdu ! Loin de là.
Ce livre donne alors de nombreux conseilles pour la gestion du stress que je ne vais pas aborder ici car je pense qu’ils méritent des articles à part entière :
- distanciation (spatiale, temporelle…)
- percevoir un challenge au lieu d’une menace
- etc.
Ils sont nombreux et pertinents. Si vous pensez être stressés et que vous pouvez lire l’anglais, je vous conseille ce livre.
Donc : vos télomères vont absorber toutes les instructions que vous leur donnez. La façon dont vous menez votre vie peut ordonner à vos télomères de vieillir plus vite, en accélérant la mort cellulaire et en ralentissant la multiplication des cellules. Mais cela peut aussi être tout le contraire. Tout dépend de votre attitude.
Comportements et espérance de vie
Alimentation, exercice, stress, l’environnement où vous vivez : toutes ces choses influencent la taille de vos télomères dans un sens ou dans l’autre.
Par exemple, la malbouffe réduit la taille des télomères : la nourriture transformée semblerait nous pousser vers la maladie.
Mais les chercheurs ont voulu aller encore plus loin que le stress en essayant de trouver une corrélation entre certains comportements et la longueur des télomères (et donc l’espérance de santé).
Même si cela peut parfois nous paraître intuitif, je suis très impressionné que l’on ait pu prouver scientifiquement que les comportements suivants nous propulsent vers la maladie :
- le pessimisme
- être dans ses pensées (au lieu du moment présent)
- la rumination (penser à un problème sans le résoudre)
- dépenser trop d’argent
- conduire trop vite
- manger trop
- l’alcoolisme
- être impulsif
- être hostile
Heureusement, il est possible de réduire son stress et d’augmenter la taille de ses télomère avec certaines pratiques telles que :
- la méditation
- le Qi Gong
- l’exercice
La retraite méditative possède un effet puissant sur les télomères : même 5 mois après, les effets sont toujours très présents !
Mais les attitudes suivantes sont également bénéfiques :
- avoir des objectifs
- se porter volontaire
- être consciencieux (organisés, persistants et focalisés)
- se réveiller heureux
Fait surprenant : être consciencieux est le trait de personnalité qui est, parmi les comportements, le prédicateur de longévité le plus fiable.
Pour vous réveiller heureux, Elissa conseille de commencer sa journée par des pensées de gratitude.
En résumé : la façon dont nous pensons et agissons possède une forte influence sur notre santé !
Chaque jour, lorsque vous vous réveillez, pensez : « Aujourd’hui j’ai la chance d’être en vie, j’ai une précieuse vie humaine, je ne vais pas la gâcher ».
Dalai Lama
L’age est un problème d’état d’esprit plus que de faits. Si tu t’en fou, cela n’a alors pas d’importance.
Becca Levy, psychologue sociale à l’université de Yale.
Anxiété et dépression
Avoir un trouble de l’anxiété montre sur le moment des télomères courts, mais si ce trouble fait parti du passé, il n’est alors plus visible. Par contre, les personnes ayant subit une dépression par le passé montrent généralement des télomères courts à plus long terme.
Télomères et environment social
Une étude de 2015 publiée dans le Journal of Health and Social Behavior a révélé que les personnes qui son contraintes de vivre dans un quartier dangereux ont tendance à avoir des télomères plus courts.
De même, un environment social avec faible cohésion sociale sont néfastes pour les télomères. Indépendamment du niveau de richesse. La propreté et la présence d’espaces verts jouent également un rôle clé pour notre santé !
Les télomères courts se transmettent à l’enfant !
Si les parents ont eu une vie difficile, il est probable qu’ils transmettent leurs courts télomères à leurs enfants. La taille des télomères est transmise à l’embryon, et tous les choix de vies des parents vont impacter les enfants : tabagisme, alimentation, stress…
Conclusion
Ce livre nous explique l’importance d’une bonne alimentation, de l’activité physique et du sommeil sur les télomères et donc sur notre santé. Comme j’en parle suffisamment sur ce blog, j’ai volontairement éludé cette partie afin de laisser plus de place au reste. Mais gardez à l’esprit qu’alimentation, activité physique et sommeil restent les clés d’une vie saine.
Ce qui est très fort avec les télomères, c’est que l’on peut vérifier l’effet de n’importe quoi sur notre santé, avec une validation scientifique concrète et significative ! C’est ainsi que l’on peut montrer l’impact du stress sur notre santé, mais aussi l’influence de nombreux comportements que l’on n’aurait pas soupçonnés ! Soignez votre attitude et votre corps vous le rendra.
Pour moi, la partie la plus importante de ce livre est donc la suivante : pour être en bonne santé, il faut vivre heureux !
Bon… bah ya plus qu’à ! !
Malades chroniques : pensez-vous être heureux ? Laissez-moi un petit mot dans les commentaires, je vous lirai avec plaisir.
Bonjour 🙂
Merci pour vos lettres que je parcours avec plaisir !
Belle continuation