Bien qu’un stress ponctuel puisse être bénéfique, beaucoup d’entre nous se retrouvent trop souvent soumis à des épisodes répétés, voire chroniques. Habituellement déclenché par le cerveau, le stress impacte fortement l’ensemble du corps. S’il dure trop longtemps, des dérèglements (mécanismes de résistance, voire de survie) surviennent à tous les niveaux, et dégradent notre santé, parfois très sévèrement.
Le stress ponctuel
La réponse spontanée à n’importe quelle source de stress est d’activer le système nerveux sympathique et provoquer la libération de l’hormone adrénaline par les glandes surrénales, tandis que le système nerveux central stimule la libération de noradrénaline. Quelques minutes plus tard, les glandes surrénales produisent l’hormone cortisol. Ces réponses biologiques ont pour but de nous donner tous nos moyens (efficacité d’esprit et énergie musculaire) afin que nous puissions réagir efficacement (par le combat ou par la fuite).
Tout ça est très bien ficelé, sauf qu’aujourd’hui nos sources de stress continuent de se diversifier, alors que notre réponse biologique, elle, n’a pas évolué.
Le corps ne sait pas distinguer les sources de stress
Le corps ne sait malheureusement pas faire la différence entre la présence d’un lion et la peur d’être en retard au travail. Ainsi, la réponse hormonale est la même. Dans les deux cas, la mobilisation hormonale et ses implications biologiques sont considérables.
Le stress chronique
Si le stress se produit souvent, il devient chronique. On peut distinguer 2 phases :
- Tant que le corps tient le coup (et ça peut durer très longtemps), il libère un maximum de cortisol. Face à ce déséquilibre hormonal, la biologie doit s’adapter, notamment par des mécanismes de résistance. Le cortisol crie au loup, mais le corps ne l’écoute plus vraiment.
- Ensuite, le corps s’épuise. Il n’a plus d’énergie et n’est plus capable de libérer autant de cortisol qu’il le voudrait. Nous n’avons plus d’énergie, nous déprimons, devenons malades, rien ne va plus…
Je ne vais pas m’attarder dans l’exactitude des mécanismes de ces deux phases. C’est donc une idée approximative que je viens de vous présenter. Ce que je souhaite mettre en avant, ce sont les conséquences physiologiques d’un stress chronique. Continuons donc.
Hyperglycémie
Le stress produit instantanément deux hormones : l’adrénaline et la noradrénaline. Mais, quelques minutes plus tard à peine, une autre hormone est également sécrétée : le cortisol. Dans ce cas précis, le rôle de cette dernière est notamment de transformer la graisse en sucre, afin de pouvoir disposer d’énergie et de répondre au stress. En effet, chez nos ancêtres, les facteurs de stress menaient souvent à l’action (combattre ? fuir ? réagir vite ?). Cela n’est plus souvent le cas, mais le mécanisme est toujours le même. Lors d’un moment de stress, nous disposons donc de plus de glucose dans le sang que nécessaire (il est mis à disposition pour les muscles et le cerveau).
Soumises au stress, certaines cellules ne sont plus autorisées à consommer le glucose, car il réservé pour les muscles et le cerveau (résistance à l’insuline). Les taux de glucose et d’insuline sont alors trop élevés. Sur le long terme, cela peut mener au diabète de type 2.
Inflammation
Le professeur américain Sheldon Cohen a pu montrer dans une étude1 qu’un stress psychologique chronique est associé à une réponse inflammatoire inappropriée (trop forte).
Plus précisément, la soumission à un stress prolongé affecte l’efficacité du cortisol dans son rôle de régulation de la réponse inflammatoire, car les tissus y deviennent moins sensibles (résistance au stress).
Système immunitaire
Le stress est théoriquement un phénomène ponctuel au cours duquel le système immunitaire n’est pas une priorité. Il est donc mis en pause. Une pause sensée être temporaire. Sur le long terme, un système immunitaire endormi est un terrain parfait pour les virus et les bactéries pathogènes.
Certaines personnes tombent malades lorsqu’elles sont en vacances. L’explication est simple : on se détend, le stress s’en va, et le corps peut alors commencer à combattre une infection latente – déjà présente mais non combattue.
Les cellules du système immunitaire, lorsque soumises au stress, ne sont plus capables de répondre à la régulation hormonale. C’est ainsi qu’elles produisent, comme nous venons de le voir, une réponse inflammatoire démesurée. Et, malheureusement, l’inflammation chronique est le siège des maladies cardio-vasculaires, de l’asthme, de maladies auto-immunes, etc.
Infections et symptômes
Lorsqu’un virus nous infecte, notre système immunitaire s’active, notamment via le mécanisme d’inflammation que nous venons de citer. Lors d’un stress chronique, nous avons vu que notre corps régule mal les réponses inflammatoires. Ainsi, pour une même menace virale, nous allons montrer des symptômes bien plus prononcés que si nous n’avions pas subi de stress. Ce n’est donc pas le virus qui cause les symptômes, mais notre faculté à réguler notre réponse inflammatoire.
Dans ce cas, nous avons donc beaucoup plus de chances d’attraper un rhume. Moins bien nous gérons l’inflammation, et plus nous montrerez de symptômes de la maladie.
Ce phénomène a pu être mis en évidence avec deux études impliquant un simple virus de rhume : une difficulté respiratoire et une production de mucus (et des marqueurs d’inflammation élevés) sont observés préférentiellement chez les personnes stressées23. Ces dernières présentent une plus forte probabilité d’être infectées par un simple rhume45
Digestion
Nous avons vu que beaucoup de mécanismes s’activent avec le stress. Afin que toute l’énergie soit utilisée pour la survie (combattre ou fuir), les mécanismes qui peuvent attendre sont mis au ralentis. C’est notamment le cas de la digestion.
Température corporelle
On ne sait pas encore bien exactement comment, mais un stress aigu peut provoquer une augmentation de température (hyperthermie) Ce phénomène est observé préférentiellement chez les jeunes femmes. Si la soumission au stress est répétée, le corps anticipe alors parfois en provoquant à l’inverse une hypothermie6.
Cancer
Une étude japonaise7 a pu observer que le stress provoque la mort (apoptose) de certains macrophages. Ces dernières jouent un rôle primordial de nettoyage en supprimant les cellules pathogènes ou malades. Si les cellules malades se multiplient, il y a possibilité d’évolution vers un cancer.
De plus, les cellules cancéreuses se nourrissent préférentiellement de glucose. On a donc un terrain ultra favorable : une glycémie élevée et un système immunitaire déprimé qui ne peut pas accomplir son devoir de nettoyage8.
L’acide hyaluronique, qui peut se trouver impliqué dans la progression de certaines tumeurs malignes (cancer), augmente en présence de stress9.
Les conditions biologiques internes observées chez les personnes atteintes de cancer sont similaires à celles provoquées par le stress : hypothermie, hyperglycémie, immunodépression et marqueurs d’inflammation10.
Maladies cardio-vasculaires
Le stress influe fortement le système cardio-vasculaire. Il élève le rythme cardiaque et la pression artérielle. Si quelques épisodes de stress ponctuels pourraient avoir un effet bénéfique, le stress chronique, en revanche est indéniablement délétère11.
Maladies neurodégénératives et troubles mentaux
Le stress possède un impact majeur sur les maladies neurodégénératives et les troubles mentaux. Une fois encore, alors qu’un stress ponctuel pourrait être bénéfique, un stress chronique devient l’ennemi d’un cerveau en bonne santé12.
Sur le long terme, le dérèglement du cortisol provoque des problèmes de mémoire13 et pourrait être un facteur de risque pour la maladie d’Alzheimer14.
Dépression
La dépression pourrait être provoquée par une soumission répétée du cerveau au cortisol15.
Appétit excessif ?
La mobilisation de toute cette énergie (même si elle n’est pas utilisée) nécessite de renouveler les réserves. Ainsi, il est fréquent d’avoir très faim après une période de stress !
Conclusion
Quand on voit les dangers que représentent le stress, on se rend tout de suite compte que c’est notre ennemi numéro 1 ! Il nous fragilise et nous empêche de guérir. Etre stressé, c’est s’intoxiquer soi-même.
Impossible de sortir de l’épuisement sans aborder le problème du stress. Impossible également de maintenir une bonne santé avec un stress chronique. Il ne se voit pas, et il en est d’autant plus dangereux. Quand il s’agit du stress, vous êtes votre propre ennemi !
Et vous ? Prenez-vous soin de votre stress ? Quelle note mettriez-vous (0-10) sur votre niveau de stress sur les 7 derniers jours ? Laissez-moi un petit mot dans les commentaires.
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Une réflexion sur « Les 10 grands dangers du stress »